Il a vu rouge
Je crois l’avoir tué et je viens me constituer prisonnier. L’homme qui s’exprime ainsi devant les gendarmes de la brigade de Pont-l’Abbé se nomme Jean-Marie Gautier, boulanger. D’une voix assurée, ne semblant nullement regretter son geste, il raconte ce qui vient de se dérouler ce dimanche 30 juillet 1891, rue Kernuz, non loin de la caserne de gendarmerie située place du Pont-Guern. C’est là que vers sept heures du soir, rentrant bredouille de la chasse aux canards, il a rencontré Guillaume Le Déliou, un banquier avec qui il a un contentieux très lourd, et il l’a apostrophé. Ce dernier lui ayant ri au nez, Gautier a vu rouge et, saisissant son fusil, l’a mis en joue et lui a tiré dessus, presque à bout portant.
Une fois le meurtrier arrêté, fouillé et déposé à la chambre de sûreté, les gendarmes se rendent sur les lieux, en toute hâte, précise le rapport. Là, au milieu de la rue, Le Déliou est étendu depuis un bon moment dans une mare de sang, la tête en bas et le visage contre terre. Le corps encore chaud est transporté à son domicile, place de la Madeleine , où le docteur Guével déclare que tout soin est désormais inutile.
Afin de mieux comprendre les raisons de ce crime et ses suites judiciaires, il importe tout d’abord de dresser le portrait de chacun des deux protagonistes.
Un boulanger
Jean-Marie Gautier, originaire de Saint-Brice-en-Coglès (Ille-et-Vilaine) , est garçon meunier dans les environs de Rennes, avant de venir dans le courant de l’été 1871 travailler à Pont-l’Abbé, chez Félix Laurent, minotier au Grand Moulin. Le 15 avril 1872, il épouse Louise-Jeanne Le Duff, couturière. Après un différend avec M. Laurent, le couple quitte le Pays bigouden pour aller tenir pendant huit ans une boulangerie sur le quai à Concarneau. Les affaires y étant difficiles, il reprend en 1880 à Pont-l’Abbé le fonds de commerce d’Antoine-Louis Ameline, boulanger au 5 de la rue Kéréon, puis achète la maison à ses héritiers en 1884 .
- La rue Kereon (Pont l’Abbé)
- La rue Kéréon où Jean-Marie Gautier avait sa boulangerie.
Dans cette commune dominée par une bourgeoisie de négociants, beaucoup d’ouvriers, faute d’emploi stable, souffrent des fluctuations du prix du pain. Cependant, les affaires des Gautier sont plus florissantes qu’à Concarneau. Jean-Marie cuit son pain dans la maison à four, située dans la cour, et Louise tient le magasin entre deux accouchements. Cinq enfants sont nés à Concarneau et cinq autres à Pont-l’Abbé. En mars 1887, le dernier est déclaré mort-né et sa mère le suit dans la tombe quelques jours plus tard .
L’aîné des Gautier, aide-boulanger, a 14 ans et le plus jeune, onze mois seulement. Désemparé, le père se remarie deux mois plus tard à Concarneau avec Joséphine Olichon, bouchère, veuve, quatre enfants. D’après l’acte de vente du 5 rue Kéréon, la maison ne semble pas assez vaste pour accueillir deux adultes et dix enfants !
Avant le décès de sa première femme, Gautier achetait du blé à Nantes et à Pont-l’Abbé et le faisait moudre à la minoterie de Brenizennec en Plozévet. Ensuite, n’ayant plus le temps de se déplacer, il a cherché une autre solution et c’est là qu’intervient Guillaume Le Déliou. Les deux hommes se connaissent, car Gautier est le chef de la musique municipale, dirigée par le sieur Le Déliou. Fâcheuse rencontre avec un individu au passé aussi dense que trouble !
Un homme d’affaires
Guillaume-Marie Le Déliou, né à Clohars-Carnoët (Finistère), fils de cultivateurs aisés, est placé comme domestique chez Louis Barbe, notaire à Moëlan. En 1884, un de ses anciens camarades se rappelle qu’enfant, Guillaume, surnommé "Guillaumic", chipait les billes des autres. Sorti du service militaire avec le grade de sous-officier, il accomplit des stages chez des notaires de Lorient, avant d’acquérir, fin 1864, une étude à Pont-l’Abbé. Il se fait rapidement un nom et le journal "Le Finistère" écrit que, grâce à son habileté et son intelligence des affaires, il a acquis promptement un rare degré de prospérité. Avec autant d’argent à sa disposition, l’homme est tenté par une carrière politique. Mais à quel politicien du cru se rattacher : au démocrate Paisant, au royaliste de Pascal ou au républicain opportuniste Arnoult ? Le Déliou va longtemps louvoyer avant d’opter définitivement pour le parti au pouvoir.
En avril 1871, sa première tentative pour entrer au conseil municipal se solde par un échec cuisant. Le notaire aux multiples clients et, pense-t-il à tort, obligés, arrive bon dernier. Mais, en octobre, il est élu conseiller d’arrondissement, poste qu’il va occuper jusqu’en 1889. En novembre 1874, Le Déliou rentre au conseil et, même si c’est de justesse, il s’imagine déjà régner sur Pont-l’Abbé. Au gré des consultations, son score s’améliore et, le 18 mai 1884, il dispute son poste à Ernest Verrye, maire sortant. Comme il n’a convaincu que sept conseillers, son concurrent se maintient. Qu’à cela ne tienne ! Il brigue le poste de premier adjoint, mais il échoue aussi. Il lui faut attendre l’année suivante pour, à la suite d’une démission, l’obtenir au deuxième tour.
Le notariat commence à l’ennuyer et, en 1886, il cède son étude à Me Traonouez. Comme l’écrit "Le Finistère", journal républicain qui apprécie ce Pont-l’Abbiste partageant les mêmes opinions politiques, le repos n’est pas fait pour une nature aussi active que celle de M. Le Déliou. Il ouvre un cabinet d’agent de change, puis crée une banque. Il est aussi receveur de rentes et représentant du "Soleil", une grande compagnie d’assurances . Devant la justice de paix du canton, il est souvent choisi comme expert par un propriétaire pour, en compagnie de deux autres personnes, statuer lors d’un congément. Ces multiples activités lui créent beaucoup d’inimitiés, mais l’homme n’en a cure et aime s’afficher en public.
Le 14 avril 1884, à l’occasion de l’inauguration de l’arrivée du chemin de fer à Pont-l’Abbé, un lecteur décrit le personnage dans les colonnes du journal d’opposition "L’Union monarchique" : "Guillaumic a toujours la même figure. Je retrouve sous la barbe grisonnante et les moustaches crochues le même teint pâle, bilieux, les mêmes yeux d’un vert insaisissable". Le portrait est peu flatteur et Le Déliou en est sans doute attristé, d’autant que les autres journaux omettent de signaler la présence du conseiller d’arrondissement à cette grande fête qui, sous un beau soleil, a réuni cinq mille personnes. Pour que l’on parle de lui, il ne peut de nouveau se faire une entorse, comme en 1882, année où, ainsi que le rapporte "Le Finistère", M. Le Déliou, blessé, a dû se faire transporter en voiture jusque devant la salle de vote des sénatoriales.
Alors, que doit-il faire pour être le premier, d’abord à Pont-l’Abbé, et pourquoi pas ensuite dans le canton ? Les élections municipales du 6 mai 1888 approchant, il prépare une liste dite républicaine, appelée "Liste Le Déliou". Il débauche des membres de l’équipe Verrye, et convainc des clients, commerçants, négociants et artisans de le rejoindre. Le commissaire de police écrit avec un brin de mauvaise foi que la plupart sont illettrés. Comme Le Déliou peine à trouver vingt-deux noms, il incorpore des électeurs sans leur demander leur avis. Furieux, l’un d’eux, Pierre Struillou père, porte plainte.
Les adversaires du candidat banquier se déchaînent et, sous le titre "Nommez Guillaumic", une chanson satirique en sept couplets circule dans Pont-l’Abbé. Le premier et le dernier méritent d’être rapportés ici :
Véritablement, je m’étonne/ D’voir un pays intelligent/ Qui, depuis des mois s’époumonne, / S’en allant, partout, répétant : /À qui l’écharpe tricolore ? À Pierre…à Paul…à Frédéric ?/ Mais pourquoi tant chercher encore ? /J’suis là !...Guillaumic !
Mon opinion…opportuniste/ Roublardo-bono-clérical/ Préférez-vous : n’importequiste ? /Au fond, moi, ça m’est bien égal ! / J’avoue qu’au premier manifeste/ Qu’acclamera le bon public/ J’serai pas long à r’tourner ma veste / Nommez Guillaumic !
Le 6 mai au soir, celui que la même chanson qualifie ironiquement de gentil, distingué, affable et qui ne se connaît pas de défaut, n’est pas élu. Il essuie un nouvel échec le 13, lors de l’élection des deux conseillers manquants. Après sa condamnation par le tribunal dans l’affaire qui l’oppose à Pierre Struillou, "L’Union monarchique" se moque de lui et de ses amis politiques : Il voulait être maire, cet homme, et à la façon de Napoléon III, il a voulu faire un 2 décembre. Hélas ! Il a recueilli un Waterloo en règle qui vient de se terminer en déroute au tribunal qui vient de le condamner à deux cents francs de dommages-intérêts envers Struillou, qu’il avait porté sur sa liste sans autorisation. Le journal conservateur glose sur ce Le Déliou de race féline qui retombera sur ses pattes..., la poitrine plantureusement républicaine, l’œil passionnément maçonnique, l’ensemble retapé, frais, gaillard et dispos, prêt à nouveau à faire risette aux vieilles barbes opportunistes du canton.
L’affaire fait grand bruit chez ses amis politiques qui n’osent le démettre de son mandat de conseiller d’arrondissement, mais pour les élections de 1889, leur choix se porte sur le négociant Félix Moysan. La carrière politique de l’homme d’affaires est-elle terminée ? Pense-t-il se présenter aux prochaines élections municipales de 1892 ? La suite de ce récit va montrer qu’il en sera empêché !
Encore un mot sur cette liste de 1888 où figure en bonne place Jean-Marie Gautier. Le boulanger aimerait, par souci d’économie, moudre son blé lui-même, mais comment faire sans finances ? Comme il est indiqué plus haut, Le Déliou et Gautier se connaissent par l’intermédiaire de la musique municipale. Le premier cherche à placer ses capitaux dans des entreprises industrielles et commerciales. Le second ne peut ignorer la réputation sulfureuse du banquier qui, avec ses méthodes, a ruiné nombre de ceux qui lui avaient fait confiance pendant la crise agricole qui a si durement frappé le canton. Pourtant, pour pouvoir acheter du blé à un prix intéressant, Gautier lui emprunte mille francs à 6 %, plus une commission non prévue par écrit .
Un cycle infernal
Un jour de l’été 1887, Le Déliou rend visite au boulanger sous un prétexte quelconque et, regardant la pièce qui sert de salle à manger, il trouve qu’elle est assez grande pour installer une machine à moudre le grain. Surpris, Gautier rétorque que le lieu est trop petit et que, d’ailleurs, il n’a pas d’argent à investir. Ce n’est pas un problème, répond le banquier. L’argent, nous en trouverons. Deux semaines plus tard, Le Déliou revient à la charge et demande à Gautier de trouver un moulin qui serait à céder. Ceux qui pourraient convenir sont, soit trop cher, soit plus à vendre . Malgré l’absence d’eau à cet endroit, Le Déliou impose à Gautier la location d’un magasin qu’il possède place de la Madeleine et lui vend une puissante machine à vapeur pour quatre mille francs. Elle peut faire tourner quatre meules, mais deux suffiront au départ.
Le cycle infernal commence.
M. Tranquille, commis dévoué corps et âme au banquier, est chargé de la comptabilité. Tous les jours, les recettes de la minoterie sont placées à 4 %, tandis que les emprunts octroyés au compte-gouttes à Gautier le sont au taux de 6 %, plus des commissions. Le meunier ne cesse de protester ; si l’argent de ses ventes lui était laissé, il aurait de quoi faire son marché, acheter du blé en quantité suffisante et ne pas, sans arrêt, quémander auprès de Le Déliou. À quel jeu joue ce dernier ? N’est-ce pas lui qui a tant insisté pour l’installation de ce moulin ? Et maintenant, veut-il se défaire de cette association qui n’ose dire son nom et, à laquelle, il ne souhaite visiblement pas que son nom soit associé ? Ainsi, en février 1888, un brigadier de gendarmerie, voisin de la minoterie, se plaint de nuisances importantes provoquées par la machine à vapeur (bruit, fumée, trépidations et risques d’incendie). Le greffier du juge de paix note que M. Le Déliou demande sa mise hors de cause, attendu que M. Gautier serait le seul responsable. Devant tant de mauvaise foi et de tracasseries, beaucoup auraient déjà quitté le navire, mais le boulanger s’accroche.
Vers la fin décembre 1889, il reçoit un billet dans lequel Le Déliou le somme de ne plus aller à la chasse le dimanche, de tenir le moulin plus propre, de ne jamais vendre de marchandises sans l’accord de M. Tranquille, et, dernier point qui provoque la colère de Gautier, de se débarrasser de l’un de ses fils. À bout de nerfs, le meunier se rend chez Le Déliou et lui annonce qu’ayant assez perdu d’argent par sa faute, il abandonne le moulin, le matériel et les marchandises, à la seule condition qu’on le laisse tranquille dans sa boulangerie. Comme Le Déliou ne l’écoute pas et veut à plusieurs reprises le mettre à la porte de chez lui, Gautier s’emporte et a cette parole malheureuse : Il y aurait charité à vous faire disparaître de Pont-l’Abbé.
Cette menace de mort à peine voilée impressionne-t-elle Le Déliou ? Le soir même, M. Tranquille promet à Gautier qu’il n’aura plus affaire au banquier et que les sommes demandées seront prêtées. Dans ces conditions, il accepte de continuer. Une troisième meule est installée, et l’assurance du moulin augmentée considérablement. Gautier s’interroge sur cette hausse, mais il ne tarde pas à en comprendre la raison lorsque, rentrant chez lui un soir, il trouve sa femme en pleurs. Réticente au début, elle consent cependant à expliquer le motif de son trouble. Le Déliou l’a convoquée pour lui dire qu’elle et son mari allaient être bientôt sur la paille. Afin d’éviter la faillite, il faudrait mettre le feu au moulin, toucher l’assurance et transférer l’activité dans un autre local appartenant à Le Déliou.
Outré par cette proposition déshonnête qui permettrait au banquier de récupérer son investissement, Gautier refuse de jouer au pyromane et continue, vaille que vaille, à faire tourner les meules. Furieux, Le Déliou ne veut plus avancer d’argent, mettant ainsi un terme à l’exploitation du moulin. Il mandate un huissier pour saisir le matériel et s’empare illégalement du stock du charbon de terre pour une valeur de mille deux cents francs. Dans le procès-verbal ne figurent pas deux charrettes que Le Déliou a mises ailleurs. Peu aguerri aux pratiques comptables, Gautier ne comprend guère les écritures passées en urgence par l’homme d’affaires et, devant un passif qui ne cesse de se creuser, il n’a plus d’autre solution que de demander au tribunal de commerce de Quimper de le placer, le 12 septembre 1890, en état de faillite.
Les créances considérables réclamées par Le Déliou sont contestées par les deux syndics qui établissent que ce dernier était l’associé de Gautier, en raison, écrivent-ils, de ses agissements et de la direction qu’il prenait des affaires. Pourquoi cette ingérence dans la marche du moulin si l’ancien notaire n’était que bailleur de fonds ? Un expert est nommé pour régler les comptes entre les parties et Le Déliou est condamné à payer le charbon qu’il a dérobé, ainsi que les frais de justice . Implacable, la machine judiciaire se met en marche et les biens de Jean-Marie Gautier sont saisis : maison, matériel de la boulangerie et du moulin. Pétrin, étouffoir, bannetons, machine à vapeur, meules, bluteries, etc. , trouvent acquéreurs à des prix dérisoires. Mme Gautier ayant obtenu la séparation de biens, le couple parvient à sauver quelques acquis et monte, place du Marhallac’h, une boulangerie mise au nom de Théodore Botte, fils issu du premier mariage de madame.
Déprimé, le failli peine à trouver le sommeil et ses nuits sont peuplées de cauchemars dans lesquels Le Déliou occupe une place de choix. Gautier, qui passe pourtant pour un homme calme et mesuré, s’imagine que, dans un café, il va cracher à la figure de celui qu’il estime responsable de sa ruine. Un duel à mort s’ensuit, mais, au réveil, craignant de mettre son projet à exécution et de plonger dans la peine sa femme et ses enfants, il quitte Pont-l’Abbé et part se calmer à la chasse ou à la pêche. Un malheur est si vite arrivé !
Il n’est plus qu’un cadavre.
La preuve ! Le malheur arrive le jeudi 30 juillet 1891. Jean-Marie Gautier a-t-il encore passé une mauvaise nuit, avec des envies de meurtre ? Vers trois heures du soir, il se rend, fusil Le Faucheux en bandoulière, le long du ruisseau d’Hellen en Saint-Jean-Trolimon. Au bout de trois heures, n’ayant pas vu un seul canard, il décharge l’arme, mais remet une cartouche lorsque son chien, sentant peut-être un volatile, se met à l’eau. Faux espoir, et Gautier, bredouille, reprend le chemin de Pont-l’Abbé, le fusil chargé. Suivant un rituel bien établi, il s’arrête, rue du Pont-Guern, dans le débit tenu par sa belle-sœur, veuve Le Duff , pour y boire une absinthe. Soudain, il aperçoit dans la cour qui est aussi celle de l’usine de conserves appartenant à Le Déliou, une petite charrette à bras, et pas n’importe laquelle. C’est celle que sa belle-sœur lui a donnée, il y a environ trois ans, pour le remercier de s’être porté caution auprès de Le Déliou. Gautier, contrarié de voir là ce véhicule "emprunté" par le banquier pour le soustraire à l’inventaire de l’huissier, prend le temps de fumer une cigarette avant de quitter le débit et d’emprunter la rue Kernuz, pour rentrer chez lui. Il y rencontre Le Déliou qui discute avec l’huissier Le Dren, avant de se rendre comme chaque soir à son usine de petits pois au Pont Guern . Le boulanger aurait dû passer son chemin, mais la tentation étant trop forte, il demande à celui qu’il considère comme responsable de sa ruine quand et comment il a payé la charrette qui se trouve dans la cour de la veuve Le Duff.
Tout en marchant, Le Déliou répond que cela ne le regarde pas et se met à ricaner, levant un bras en signe de dédain. Alors, Gautier voit rouge, saisit son fusil et l’arme. Machinalement, Le Déliou se détourne et baisse la tête. C’est alors que Gautier tire sans viser, selon ses dires . L’huissier Le Dren, qui s’était éloigné de quelques pas, se retourne au bruit de la détonation et voit le banquier face contre terre et perdant du sang par-derrière la tête. Alors qu’un attroupement se forme autour de celui qui n’est plus qu’un cadavre (déposition du serrurier Briec), le meurtrier se dirige calmement vers la gendarmerie.
Le lendemain matin, c’est l’effervescence avec l’arrivée du procureur, du juge d’instruction et de son greffier sur les lieux du crime où, au milieu de traces de sang séché, se trouvent encore des débris d’os. À l’ombre des arbres du jardin de la victime, le docteur Le Guével, chargé de pratiquer l’autopsie, constate les dégâts provoqués par les plombs au niveau du crâne et de l’encéphale. Dans l’après-midi, le tireur est conduit à la gare de Pont-l’Abbé où la foule présente lui fait presque une ovation selon "Le Courrier de la Cornouaille". Comment ne pas être ému par le spectacle de sa femme et de ses enfants se précipitant pour l’embrasser, avant qu’il ne soit transporté à Quimper, pour être écroué à la prison de Mesgloaguen ? Ce vendredi, on entend bien plus de pleurs et de gémissements que le lendemain à l’église, lors des obsèques de Guillaume Le Déliou. De nombreux cultivateurs, dont l’homme d’affaires percevait les fermages, se mêlent à des notables, mais les Pont-l’Abbistes sont peu nombreux.
- Place du Pont-Guern à Pont-l’Abbé
Sur cette place se trouvait l’usine de petits pois de Guillaume Le Déliou.
À droite, c’est la rue du Pont-Guern (actuelle rue Jules Simon). En la remontant, la première à gauche est la rue de Kernuz (actuelle rue Michelet).
La suite la semaine prochaine...
L’ouvrage est illustré par 26 aquarelles magnifiques, souvent irrévérencieuses, signées Jean-Marie Misslen, un peintre de grand talent.
Si ce livre était paru il y a un siècle, nous aurions été excommuniés ! Même mon auguste père m’aurait renié.
Livre d’or : http://www.chuto.fr/index.php/livre-d-or
BLOG GRATUIT : https://www.lesarchivesnousracontent.fr/